« J’ai pas choisi de naître ici mais d’être ici »
Un fil est tendu entre deux sommets de pyramides. Une femme est à un bout et va tenter de rejoindre l’autre extrémité : c’est la femme qui marche. Et entre ses deux points, elle va se questionner, questionner l’existence, prendre le fil de la vie pour tenter d’aller jusqu’au bout de ses rêves… Alexandra Seringe, comédienne, metteure en scène et auteure est seule sur le plateau du Théâtre Pixel avec son texte, son histoire, son for intérieur qu’elle va nous délivrer pas à pas durant une petite heure…
Sur la scène du théâtre, un rai lumineux bleuté, posé à même le sol symbolise le fil de la traversée que s’apprête à faire la comédienne ou plutôt la femme qui va marcher. L’idée est fabuleuse d’imaginer cette femme sur son fil qui prend son courage à deux mains et se lance le défi de rejoindre l’autre côté comme une funambule de passage qui n’est pas du tout sûre d’y parvenir. Dès les premières minutes du spectacle, on y croit, on est avec elle et on a réellement l’impression qu’elle marche en suspension sur un fil à des centaines de mètres de haut. C’est bluffant.
Et une fois ce défi relevé, celui de nous embarquer sur son fil, débarquent alors tous les autres défis existentiels que la femme qui ne fait plus que marcher doit affronter. Ne pas tomber, se relever, continuer, y croire, rêver… Alexandra Seringe utilise la scène avec une grande intelligence : il y a le fil du spectacle qu’elle ne doit pas lâcher et puis il y a les à-côtés, les incidents, les bulles dont lesquelles se réfugie le personnage à chaque fois que sa marche est déviée, à chaque fois qu’elle chute.
Des bulles comme autant de moments suspendus où parfois le découragement ou le désespoir viennent la gratter et l’empêcher d’avancer ; des bulles de la femme qui erre, vagabonde et sans but ; des bulles de la petite fille abandonnée à qui on finit par tendre la main pour l’emmener au pays des rêves ; une Alice qui tente de s’émerveiller, une petite « fille aux allumettes » à deux doigts de se brûler les ailes. Tous ces instants à la marge du fil vont nourrir la traversée et lui donner le courage d’avancer encore de quelques pas.
La comédienne avec son jeu simple et direct marche élégamment sur son fil ; elle joue parfaitement de son corps élastique et longiligne pour « chorégraphier » ses mouvements justes et instinctifs. Elle devient même parfois plusieurs badauds qui regardent cette femme marcher. En suivant le fil de sa vie, la femme qui marche nous renvoie à nos propres questionnements, à la force qu’il faut pour surmonter les obstacles et braver les aléas de l’existence. La vie est belle semble t-elle nous dire mais c’est à nous de nous battre pour nous la rendre belle ; ne pas couper ce fameux fil, tenter de le préserver surtout lorsqu’on est au bout du précipice…
Et c’est vraiment beau de voir l’actrice transpirer de sincérité. Elle est elle-même, ne triche pas, aérienne et ancrée à la fois, sensible et terriblement humaine. Car il faut du courage pour se livrer et se délivrer. La femme qui marche n’a « pas choisi de naître ici mais d’être ici » et nous avons choisi d’être ici avec elle pour tenter d’aller au bout de nos rêves. C’est au Théâtre Pixel, dépêchez-vous d’y filer car le temps file si vite !
La femme qui marche
Une création d’Alexandra Seringe
Texte, jeu et mise en scène : Alexandre Seringe
Lumières : Jérôme Bertin
Contact compagnie : Théâtre des Tuileries theatredestuileries@gmail.com
Les jeudis du 12 mai au 30 juin à 19h30 : Durée : 1h
Théâtre Pixel
18, rue Championnet Paris 18ème
Métro : Simplon (ligne 4)
Réservations : 01.42.54.00.92 / www.theatrepixel.org